Vernant, la Gorgone et le Miroir
22 minutes – 2007
Tapuscrit...
Jean-Pierre Vernant – Voilà, ici, y a… Elles sont trois Gorgones, là y en a deux, qui sont encore bon pied, bon œil, si j’ose dire, la troisième, elle est sans tête, la tête se trouve ici, dans cette espèce de sac où Persée l’a enfouie… Il se sauve… Là, y a Athéna, qui d’une certaine façon se trouve entre Persée et les Gorgones, parce que celles-là vont le poursuivre, et Persée s’enfuit ayant accompli son exploit. De quel exploit s’agit-il ? Alors… Et pourquoi parler de Persée au moment où il est question du miroir… Persée, je n’entre pas dans les détails, Persée est obligé d’accomplir un exploit impossible, c’est-à-dire de ramener la tête de la Gorgone. Or, la tête de la Gorgone, la Gorgone, la Méduse, ce qu’elle a, c’est qu’elle a un regard qui vous fait disparaître de l’univers lumineux. C’est pas qu’elle vous aveugle, c’est un aveuglement, on est rendu au monde de la nuit, on est mort… La Gorgone, son visage normalement monstrueux, qui est une image de Chaos, c’est la mort, c’est la destruction. Comment est-ce qu’on pourrait ramener cette tête ? Je passe sur les détails, tout le problème, pour Persée, c’est de savoir comment il sera possible de tuer la Gorgone sans croiser son regard. Si un regard humain croise le regard de la Mort, il n’y a plus de regard humain… Il disparaît, il est anéanti. Alors là, les légendes, les mythes, les différentes versions du mythe et les différentes versions des représentations figurées, ou bien… Y a une sorte d’effet cumulatif : d’abord, y faut que lui, il ait des possibilités de voler à travers la distance, un don d’ubiquité, comme les Gorgones… Il obtient ses sandales ailées… Il obtient aussi à la fois la besace où il va cacher cette tête, parce que quand il va la transporter, s’il la transporte sans la cacher, elle va pétrifier toutes les créatures vivantes qui croiseront son regard, et il a une espèce de faucille, de harpè, avec laquelle il va lui couper la tête… Il faut qu’il l’aborde au moment où elle dort. Mais c’est pas suffisant, parce que, elle dort mais, elle peut se réveiller au moment où il va lui couper la tête et c’est fini ! Il faut donc qu’il lui coupe la tête sans risquer de croiser son regard… Très souvent, dans les images, il regarde de l’autre côté. Et à partir d’un certain moment, je crois que c’est le milieu ou la fin du 5e siècle, apparaît une réponse à ce problème, qui est le miroir. Athéna est là, avec son bouclier poli comme un miroir, Athéna est à côté de Persée, et au lieu qu’il regarde la Gorgone Méduse, Persée regarde sur le miroir que constitue le bouclier, cette tête, et par conséquent, d’une certaine façon, d’une certaine façon, parce que le mythe joue des ambiguïtés, la force destructrice de ce regard est anéantie à travers le reflet. Pourquoi c’est intéressant, c’est intéressant d’une part pour comprendre comment les Grecs pouvaient voir ce qu’était le regard de la Mort, d’autre part parce que, d’une certaine façon, le visage fonctionne… L’œil de Méduse fonctionne comme une sorte de miroir, où quand on se regarde, on devient soi-même cette tête de Mort, c’est-à-dire on est transformé à travers le miroir en ce qu’on deviendra lorsque on sera une tête, comme disent les Grecs, « vêtue de nuit » ! Au lieu d’être nimbée de lumière… Et par conséquent, il y a cela ! Et en plus, y a par derrière tout le problème… Méduse est une tête qu’on ne peut pas voir, elle est non visible, comme elle est indicible ! On ne peut pas ni voir ni dire ce qui est absolument chaotique, ce qui est l’anéantissement… On peut pas le dire… Et pourtant, d’une certaine façon, le miroir va refléter cela… Et en le reflétant, de la même façon que sur le vase, le peintre lui aussi va jouer un rôle de miroir, puisqu’il va représenter cette tête qui est non représentable ! Toute cette problématique, comment est-ce qu’on peut… faire voir… ce qui échappe à toute vision, ce qui vous détruit si on le voit, est d’une certaine façon présent dans le travail des peintres à travers cette, cette façon d’introduire au 5e siècle le miroir comme solution du problème de la légende de Persée… Alors, c’est à la fois, je disais que, ça désarme ce regard, mais ça ne le désarme pas complètement, parce que cette tête de Méduse, elle est figurée sur les boucliers, elle est figurée comme on l’a vu tout à l’heure sur le bouclier d’Athéna, et elle est figurée aussi sur le bouclier de certains guerriers particulièrement dangereux ! Si elle est figurée, c’est que même l’image continue à avoir certains effets qu’avait la tête de la Méduse ! Quand je mets la tête de la Méduse sur mon bouclier, que je le présente à mon adversaire, j’escompte plus ou moins que devant cette image, ce reflet, qui a perdu de sa force, de la tête de la Mort, il sera lui aussi pétrifié de terreur et je pourrai le frapper avant qu’il ne bouge ! Y a donc un jeu très compliqué qui montre que dans le miroir, à la fois on a une image qui peut être considérée comme affaiblie, comme obscure, Schya, une ombre, ça n’est pas vous, c’est simplement votre apparence plus ou moins obscurcie, et en même temps, dans le même miroir, y a l’idée que ce qu’on aperçoit, c’est une espèce d’ouverture vers l’au-delà, c’est quelque chose qui peut vous révéler à vous-même ! D’autant plus que, si on réfléchit au contexte qui est celui de la culture grecque, le miroir, pour les femmes mais aussi pour les hommes d’une certaine façon, est la seule manière de se connaître soi-même ! Tout le monde connaît ce texte de Platon où Socrate se demande comment est-ce qu’on peut se connaître soi-même, et où y répond que pour se connaître, y faut regarder l’œil de quelqu’un d’autre et que dans cet œil, ce qu’on voit, c’est sa propre image… Mais ça veut dire que, pour le Grec, se connaître, ça n’est pas rentrer en soi-même par introspection, pour essayer de se découvrir de l’intérieur, se connaître, c’est, à travers le regard que les autres portent sur soi, à travers le croisement de regards, essayer en même temps de comprendre et l’autre et soi dans leur rapport… Et en ce sens, le miroir va occuper une espèce de position stratégique par rapport à la connaissance de soi ! La seule façon de « me connaître », c’est de me regarder dédoublé, objectivé, posé en face de moi comme un autre moi-même ! Et de se regarder là-dedans ! Alors il va y avoir toute une problématique, que d’une certaine façon déjà le mythe de Persée indiquait, mais qui sera beaucoup plus fort, je crois, à la fois dans le mythe de Narcisse, où Narcisse, comme vous le savez, regarde son reflet dans l’eau… Narcisse a fait en quelque sorte le serment de ne jamais succomber à l’attraction amoureuse, la nymphe Écho puis un personnage masculin essaient de l’attirer dans les, dans le filet de l’amour, il refuse, mais quand il voit… Quoi ? Lui-même en tant qu’autre, dans le reflet de la fontaine, alors il s’éprend de ce reflet sans savoir que c’est lui-même. Il s’en éprend dans le – le mot narcissisme a pris un sens différent – mais dans la légende grecque il regarde cet autre qui lui est proche, cet autre dont certaines versions, que nous connaissons par Pausanias, je crois bien, oui, disent que c’était sa sœur, sa sœur jumelle, qui était aussi sur le plan féminin une autre lui-même ! Mais en réalité les versions les plus normales, c’est : il prend pour un autre ce reflet de lui-même. Et tout le problème est là : c’est que je ne peux me connaître que d’une certaine façon en me projetant comme un autre ! Alors y a le mythe de Narcisse, et y aura ensuite le mythe de Dionysos, de Dionysos qui lui aussi va être pris au piège du miroir, c’est la légende, je crois qu’on peut dire qu’elle est orphique, fondamentalement, à savoir que Dionysos est un dieu enfant, les Titans, qui sont ses ennemis, pour des raisons, je laisse de côté, l’attirent, avec un certain nombre de jouets ! Un certain nombre de jouets, une poupée articulée, une toupie, si vous voulez, et un miroir ! Et l’enfant prend ce miroir, se regarde dans le miroir, et c’est parce qu’il est fasciné, par quoi ? Par cette espèce d’enfant qui est en face de lui, qui est lui-même, mais qui n’est déjà par lui-même, qui est un reflet de lui-même, que les Titans se précipitent sur lui, le coupent en morceaux, le coupent en rondelles, le mettent à cuire et le dévorent, sauf le cœur, qui sera finalement le moyen de le ressusciter ! Et alors, à partir de cette histoire, de ce jeune enfant divin, qui représente d’une certaine façon, qui va représenter au terme de l’histoire la totalité de l’Univers, l’Univers revenu à l’unité primordiale, ce petit enfant se regarde dans le miroir, il se dédouble, il s’objective, et c’est à partir de cela que s’engage un processus à travers lequel ce qui était d’abord un et complet va se fragmenter, va se diviser, et que le monde va se constituer dans sa multiplicité et dans ses apparences disparates ! Donc le miroir, qui est lui et qui est en même temps non-lui, puisque c’est le début, à partir de soi, de donner naissance à quelque chose, qui est en même temps soi-même et puis une simple apparence, une dispersion, la multiplicité indéfinie… On voit à travers ces mythes, ce sont des mythes, que dans un contexte culturel où ni le regard ni l’individualité de ce que nous appelons un sujet personnel, n’ont la même physionomie que pour nous, toutes ces histoires-là montrent bien que des problèmes qui pour nous sont encore des problèmes vitaux, le rapport de soi à l’autre, le rapport de l’un et du multiple, le rapport du réel et de son apparence, de ce qui est vrai et de ce qui est simplement un reflet du vrai, tous ces problèmes, d’une certaine façon, sans être posés en termes philosophiques, sont présents, chez les Grecs…
Françoise Frontisi – Persée a coupé la tête de la Gorgone, tout se passe comme s’il la rendait visible, tout à coup, de la même façon qu’il l’a rendue visible à Persée en plaquant son reflet sur son bouclier, et à ce moment-là, la tête de la Gorgone devient le gorgoneion, qui est une image qui est répandue, alors, avec une profusion extraordinaire, et en particulier sur les vases, alors au fond des coupes, où il faut l’imaginer, euh… à travers le vin…
Jean-Pierre Vernant – Surtout qu’il l’avait sous le nez, hein ! Quand y finit sa coupe, y voit ça, tac ! … Elle est faite, elle conjoint sans sa face des aspects du monde qui sont au contraire inconciliables ! Elle est à la fois humaine et bestiale ! Elle est à la fois féminine et masculine, puisqu’elle a, très souvent, comme vous le voyez ici, une espèce de barbe !
Françoise Frontisi – Parfois, elle a des boucles d’oreilles, mais ici, ça n’est pas apparent…
Jean-Pierre Vernant – Quelquefois, elle a des boucles d’oreilles, elle a souvent aussi, là, des… Les espèces de points qui sont marqués, elle les a là…
Françoise Frontisi – Mais ça n’est pas féminin, hein, ça serait plutôt…
Jean-Pierre Vernant – Non, pas du tout, oui, mais justement !
Françoise Frontisi – C’est une verrue… Comme en ont les Satyres…
Jean-Pierre Vernant – C’est une… Oh… Non, pas seulement ! Pas seulement… Pas grec, un peu barbare ! C’est-à-dire, elle est véritablement une image chaotique, elle a… Elle a en même temps la bouche ouverte, elle pousse un cri absolument effroyable, elle tire la langue, la plupart du temps, sur certaines images, la langue est déployée comme une sorte de tapis qui lui vient là, et qui cache ses éléments de barbe, elle tire la langue… Ben… Là aussi, on peut imaginer, je dis imaginer parce qu’il y a rien de certain, la valeur… Ce qui était… Ce qui doit être dedans est dehors, chez elle… Et ce qui est… Elle est féminine, et cette langue qui ressort, aussi, donne, fait penser à une sorte de, de phallus… Tout ça… Ça peut l’être… Si, si ! Parce que, quand on tire la langue à quelqu’un, c’est un peu du même type que quand on fait des signes de doigts qui ont un caractère obscène ! On tire la langue… C’est aussi une inversion de, de ce qui est normal, la langue est faite pour rester dans la bouche, on la sort et on la sort devant quelqu’un, on montre ce qui ne doit pas être montré… Et elle, cette langue énorme qui sort, donc, y a tout cela… Elle est…
Françoise Frontisi – Et puis, ça lui interdit de parler de façon articulée…
Jean-Pierre Vernant – Ça lui interdit de parler de façon… Mais elle pousse…
Françoise Frontisi – …de parler avec la langue…
Jean-Pierre Vernant – C’est un cri, c’est un cri affreux, qu’elle pousse ! On le sait, parce que Pindare le dit, que les Gorgones poussent des cris qui sont des cris aigus et affreux ! Alors, à un moment donné, ce visage de mort et de monstruosité, de chaos…
Françoise Frontisi – Oui, qui surtout est fait d’éléments animaux, hein…
Jean-Pierre Vernant – Bien sûr, c’est le… C’est… L’humain et l’animal sont conjoints, au lieu d’être disjoints… Cette image-là, à partir du moment, peut-être, où le miroir va le refléter, comme le disait Françoise, très justement, les valeurs féminines et esthétiques de beauté que le miroir comporte se projettent sur ce reflet et on va avoir une Méduse, qu’on connaît bien, qui est la Méduse de l’art naissant, qui est une superbe femme ! Superbe jeune femme !
Jean-Pierre Vernant – On aperçoit là des bouts du bas, ben, c’est le bélier, qui est là ? Oui, oui…
Françoise Frontisi – On voit la tête du bélier…
Jean-Pierre Vernant – On voit la tête du bélier qui a été égorgé, et avec son glaive – y a la foule de ces têtes qui arrive – avec son glaive, dans l’Odyssée, Ulysse écarte ceux qui ne sont pas intéressants, la foule des morts anonymes, pour que ne viennent que ceux avec lesquels il veut parler, avec sa mère, avec Agamemnon, et surtout Tirésias… Alors, ce monde des morts, ce sont des visages complètement perdus les uns dans les autres, dans une espèce de brouillard indistinct, et il va y avoir quelques visages qui vont surgir et apparaître et avec lesquels il va, lui, parler ! Avec sa mère, pour savoir où ça en est, et surtout avec Tirésias, qui va lui dire les conditions de son retour… Mais des visages, qui en quelque sorte non seulement sont vêtus de nuit, mais qui même quand on les évoque, en faisant les sacrifices qui viennent, en leur donnant, ils sont asséchés, en leur donnant à boire du sang d’une bête, ils vont retrouver pour un moment une certaine forme d’existence, non seulement ils sont vêtus de nuit, mais c’est une nuit dans laquelle ils ne se distinguent plus ! Et, et… Dans le miroir, y a un peu de ça, y a des traits, mais tout ça est embrumé, et c’est pour ça que le miroir, d’une certaine façon, peut évoquer à la limite ce qui se passera dans le miroir que sont les yeux de la Gorgone, lorsqu’elle vous rend complètement au monde de la nuit ! Là aussi, y a des passages possibles… A la fois ça s’oppose, puisque c’est avec le miroir qu’on peut lui couper la tête, mais en même temps, dans le miroir, y a quelque chose qui évoque ce danger de la même façon que les yeux de la Gorgone fonctionnent comme un miroir où quand vous vous y mirez, ce que vous voyez, c’est ce que vous allez devenir une fois que vous serez dissous dans le monde de la nuit… Tout ça n’est pas tout à fait le hasard… Y a un cas que Pausanias nous raconte aussi, c’est… un sanctuaire, un temple, d’une divinité qui s’appelle Despoina, la Maîtresse, à Lykosoura, en Arcadie, et qui est très… très pertinent pour voir comment le miroir est à la fois un reflet obscurci et en même temps quelque chose d’autre, c’est-à-dire ouverture sur l’au-delà… Pausanias raconte que dans ce sanctuaire, il y a, au fond du sanctuaire, où le public peut entrer, une grande statue de Despoina assise, avec à côté un personnage féminin, un personnage masculin, et que lorsqu’on sort, lorsqu’on tourne le dos à cette grande, à ces grandes figures des divinités, qu’on sort, du temple, on trouve, juste avant la porte, encastré dans le mur, un miroir… Et il ajoute que dans ce miroir, les humains, les hommes, les dévots, qui sortent, se regardent, et ou bien ne s’y voient pas, ou s’y voient de façon complètement obscurcie et les termes qu’il emploie sont des termes que nous retrouvons quand on décrit par exemple ceux qui sont dans l’Hadès… Mais que, en même temps que devant ce miroir, on n’y est pas, ce miroir, lui, présente de façon tout à fait visible et précise les figures des Divinités… Des figures qui trônent en majesté là-bas… Autrement dit, dans ce miroir se trouvent réunis le fait que l’humain qui se voit, ben, il se voit, il se dédouble, c’est une façon de se voir, mais que il se voit déjà comme une sorte d’ombre, de Schya, comme une sorte de Psyché, d’âme vêtue de nuit… Et qu’en même temps, cette espèce de valeur moindre, puisque c’est moins que la réalité, est une valeur plus ! Parce que en même temps que l’apparence n’est pas le réel, l’apparence, en quelque sorte, nous révèle ce qu’il y a derrière, c’est-à-dire la Divinité, c’est-à-dire, véritablement, un au-delà ! Alors on voit bien comment le miroir peut être à la fois reflet illusoire, pure apparence et en même temps révélation de… de ce que nous sommes les plus profondément, de sorte que dans la littérature, on verra à la fois le miroir servir pour expliquer que c’est dans le miroir que la vérité d’un homme se révèle, exactement comme le vin est pour l’âme, le miroir est pour soi, on était jeune, on vieillit, on se regarde dans le miroir, on ne peut pas tricher avec le miroir, il est la vérité, d’une certaine façon, et en même temps le miroir va servir aussi, sur le plan, dans la tragédie, à indiquer le caractère purement illusoire de ce qu’on voit, on voit dans une pièce une jeune femme qui se regarde, elle s’admire, elle a ses boucles, mais déjà cette image dans le miroir prépare ce que le texte va dire un peu plus loin, c’est-à-dire que, elle va périr avec un visage complètement brûlé, dans un état absolument épouvantable… Y a perpétuellement ce jeu, y a nous, y a le reflet, qui est moins, et en même temps, par-delà, quelque chose qui nous échappe, qui est beaucoup plus que l’apparence et d’une certaine façon même beaucoup plus que ce que nous sommes en réalité, le miroir permet de faire jouer tout ça, coïncider tout cela…
21 min 57 s
Persée ne parvenant à vaincre la Gorgone et son regard pétrifiant qu’en lui tranchant la tête reflétée sur le bouclier d’Athéna, Dionysos massacré par les Titans parce que fasciné par son miroir-jouet, Narcisse se perdant dans son reflet, Ulysse interrogeant Tirésias au royaume des morts : à partir de quelques mythes grecs dévidés comme au rouet, Jean-Pierre Vernant offre les clefs de la représentation du monde des Grecs anciens : de soi-même en miroir dans le regard de l’autre aux ombres errantes dans le miroir sombre de l’Hadès.